« L’Europe » a-t-elle rejeté l’interdiction de la senne démersale dans la Manche lors du trilogue de jeudi?
D’abord, un trilogue, c’est quoi?
Quand un texte législatif est proposé par la Commission européenne , il doit être voté dans les mêmes termes par le Parlement européen et le Conseil de l’UE, qui représente les États.
C’est donc est la réunion de ces 3 institutions pour s’accorder sur le texte.
Le trilogue sur l’accès aux eaux et la senne démersale
Il avait pour objet la prolongation du régime de limitation de l’accès des eaux côtières des pays européens aux navires des autres pays européens. Cela parait un peu technique.
Dans la version adoptée par la commission PECH du Parlement, un amendement permettait à la France d’interdire la senne démersale :
- pour les bateaux belges et hollandais,
- dans ses 6/12 milles dans la Manche est et la Mer du Nord.
Comme une majorité des mes collègues, et au désarroi de nos collègues hollandais, j’ai voté pour cet amendement vu la situation compliquée de la pêche dans ce secteur.
Conscient qu’il s’agissait d’ouvrir la voie à l’interdiction de la senne pour les seuls belges et hollandais le Conseil, lui, n’a pas adopté une telle disposition. Considérant comme discriminatoire l’amendement puisque ne s’adressant pas à tous les pêcheurs, il en a fait une ligne rouge.
Au cœur de l’action
Rapporteur du texte, j’ai eu à défendre notre amendement en trilogue. J’ai rappelé que les pêcheurs français s’interdisaient la senne démersale pour les navires de plus de 25 m dans ces mêmes eaux.
Cependant, le barrage du Conseil a persisté.
J’ai rappelé l’urgence qu’il y avait à agir, face à une situation qui s’était aggravée avec le Brexit.
Réponse du Conseil : « ligne rouge, ce n’est pas le bon outil juridique« .
Face à ce refus, et au regard du danger qu’aurait représenté une absence d’accord ce jeudi qui aurait mené à la fin de toute limitation au 1er janvier, j’ai pris le temps de réunir les collègues responsables de texte pour leur groupe (les « shadows »).
Les Verts, les Socio-démocrates, le PPE et ECR étaient représentés. Ni ID, où siège le Rassemblement National, ni The Left, où siège LFI n’avaient désigné de représentants…
Avec les shadows, nous avons pris le pli de négocier un engagement fort pour mettre en œuvre un processus solide de restriction pour la senne dans la Manche est et la Mer du Nord.
Ce processus doit mener à une règlementation robuste, uniforme, partagée et non-discriminatoire. Une réglementation européenne basée sur des faits scientifiques et une analyse partagée et concertée avec les pêcheurs.
Ce que nous avons obtenu
Une déclaration conjointe de la Commission européenne et du Parlement européen demandant plusieurs points :
- la commission s’engage à dégager des financements pour étudier l’impact de la senne danoise dans la zone.
- le Parlement et la commission encouragent pêcheurs des différents pays et les États à ré-engager les discussions pour proposer des mesures forts de réduction de la senne.
- les mesures fortes devront s’appliquer à toute la Manche est et la Mer du Nord côté français et pas seulement aux eaux côtières.
- ces propositions seront discutées par les États concernés qui devront en faire une recommandation conjointe à la Commission européenne.
- la Commission européenne devra, sur la base de ces recommandations conjointes et des études scientifiques, formuler des propositions de modification du règlement « mesures techniques », seul règlement robuste à portée réellement européenne.
Le Parlement est déçu que des mesures n’aient pas pu être mises en place immédiatement pour réduire la pression dans la zone concernée.
Pour autant, le Parlement suivra avec attention l’avancée du processus qu’il appelle de ses vœux. Ces mesures doivent être effectives rapidement, tout en respectant la non-discrimination entre les nationalités et en ayant une étendue d’application sur l’ensemble de la Manche est et de la Mer du Nord
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